jeudi 19 novembre 2015

26 octobre au 1er novembre 2015 - Voyage Voyage! Mélodie lancinante...

Reprenant la route pour Zoige (Ruo Er Gai en chinois), nous apercevons des pélerins tibétains de tous âges qui se rendent à Langmusi en se prosternant (ils se couchent par terre!) tous les 3 pas. Nous sommes ébahis par tant de dévotion. Cela nous semble plutôt extrême, comme démonstration de foi...

Nous savourons une belle pente descendante sur une dizaine de kilomètres, puis, évidemment, ça remonte. Dans la montée, des motards enturbannés dans d'épaisses écharpes passent à notre hauteur, restent un moment à rouler à nos cotés, rigolent et repartent plein gaz.

Nous arrivons au bout d'un moment devant l'entrée d'un vieux tunnel de 1,6km traversant la montagne. L'air y est saturé de poussière , la lumière inexistante et les klaxons résonnent fort dans nos pauvres oreilles. La traversée nous semble interminable... Nous finissons par surgir sur un plateau à 3300m, appelé le Grassland. C'est une immense prairie pauvre en végétation, toute jaunie par l'automne. Nous retrouvons les troupeaux de moutons et de yaks, menés par les bergers tibétains. C'est l'heure de trouver un lieu où dormir. Nous repérons un campement touristique fermé pour l'hiver, à l'arrière d'une petite épicerie de bord de route. Jonas demande à la propriétaire du petit shop si nous pouvons camper là, elle nous offre alors la possibilité de mettre notre tente dans la grande yourte principale, au centre de la place. Emma se découvre un sens caché pour l'animation enfantine, elle amuse les deux petites filles du couple d'épiciers. Nous préparons notre souper à l'abri de l'humidité, qui se fait ressentir dès le coucher du soleil.



Tunnel obscur et poussiéreux

Notre abri à la tombée du jour

Une table, des chaises, un beau tapis, des lustres, tout confort, manque plus que le chauffage!
Le matin, ça caille bien et la tente est toute mouillée par la condensation, malgré que nous ayons campé à l'intérieur. Toutefois dehors le soleil est de la partie, nous réchauffant pour la soixantaine de kilomètres de steppe qui nous sépare encore de Zoige. Nous sommes étonnés par le nombre de camps touristiques bordant la route, tous décorés de petits drapeaux colorés, avec toilettes privées en tous genres dont nous profitons bien. Il paraît qu'à la belle saison, la steppe est couverte de fleurs. Petite pause, nous dégustons dans un petit shop touristique de la viande séchée de yak et un yogourt de la même provenance. C'est bon!
 


Ca grimpe...

A cette altitude il n'y a plus que de l'herbe sèche
,
Nous arrivons à Zoige en fin d'après-midi, avec l'intention d'y prendre un bus le lendemain pour nous rapprocher du Parc National de Huanglong. A la recherche d'informations sur la gare routière, nous croisons une jeune femme, Yu Xi, qui nous offre spontanément le logement pour la nuit. Super, nous n'avons pas besoin de chercher un hôtel à la nuit tombante. Yu Xi enseigne le chinois à la High School de la ville. Elle nous gâte, nous offrant des biscuits, des noix, des bonbons. Emma reçoit de sa part de jolis gants bleus à pois, avec un petit noeud noué sur le poignet. Un joli cadeau très fashion!

Le lendemain, Yu Xi nous accompagne à la gare routière pour nous aider à acheter nos billets de bus avant d'aller travailler. Le voyage se passe bien, nous aimons aussi "endurer" les longues montées confortablement assis à bord d'un autocar.


Une très belle rencontre avec Yu Xi.

Débarqués  du bus à Chuanzhusizhen, 80km plus au sud, nous prenons un bon bol de nouilles avant d'attaquer la montée sur la route qui mène au Parc National de Huanglong. 1000m de dénivelé pour atteindre le col à 4000m.

Chuanzhusizhen. On se croirait à Crans-Montana!

Nous sommes déjà en milieu d'après-midi lorsque nous entamons les premiers et longs lacets. A 18h, le ciel se couvre rapidement de gros nuages. La neige menace, ca craint! Nous trouvons une petite route quittant les virages de la montée et nous contentons d'un petit lopin d'herbe plat et un peu bosselé. Une fois la tente montée, les nuages semblent nous contourner. Ouf!
Nous reprenons la route le lendemain par un temps changeant, stupéfaits par la quantité de cars touristiques qui nous dépassent. Nous nous amusons à les compter pendant une heure, 130 bus entre 12h30 et 13h30! Ça en dit long sur la fréquentation du site de Huanglong et nous fait craindre un peu pour notre visite du lendemain...


Belle montée, belles vues, météo capricieuse

Magnifique spot pour une nuit reposante.

Repos bien mérité pour nos montures!
Lorsque nous atteignons le col, nous pénétrons dans un épais brouillard qui nous cache le pic sacré Xuebaoding ("Trésor de neige"), culminant à 5'588m, plus haut sommet de la chaîne des monts Minshan. Dommage! Le froid devient mordant, on remet vite fait toutes nos couches pour les 20km de descente. 
Avant le col, vue sur le Xuebaoding enneigé (au fond)


La Grande Muraille de Chine

Nous passons de 2600m à 4000m, que la route est longue.
L'arrivée à Huanglong est un peu surréaliste. Des dizaines et des dizaines de cars sont garés l'un derrière l'autre, la place grouille de Chinois surexcités et de stands de bouffe et fast-food en tout genre. Congelés par la longue descente, on n'a vraiment pas envie de dormir sous tente, d'autant plus qu'il n'y a pas vraiment d'endroit pour cela... Malheureusement, impossible de trouver un hôtel bon marché dans ce lieu ultra-touristique. On négocie comme des forcenés pour obtenir finalement une chambre à 180 yuans (env. 28 CHF), dans un hôtel bien chic. Couverture chauffante, douche chaude, lampes chauffantes dans la salle de bains, thés à disposition et chaussons en éponge, le luxe!

Le lendemain matin le temps est bien maussade, nous n'aurons pas le soleil tant espéré pour la visite de ce magnifique parc. Le gris du ciel qui se reflète sur les bassins atténue leur intense couleur turquoise. Les photos ne rendent pas bien, nous sommes frustrés. Le site est aménagé comme un parc d'attraction: petits sentiers de bois qu'on ne peut quitter, télécabines pour monter au sommet, cabanes à snacks et WC tous les deux cents mètres. Il se vend également des bonbonnes d'oxygène pour les citadins qui passent de 500m aux 3'500 m de Huanglong en quelques heures de bus.


Temple de Huanglong


Clochettes dans le temple Taoiste
Bel encensoir aux odeurs enivrantes

Bassins de calcaire aux teintes naturelles (le soleil manque)





Les touristes chinois se selfient à qui mieux mieux, se bousculant sur les plateformes pour obtenir le meilleur point de vue, dans ce qui ressemble à une véritable foire d'empoigne. Le spectacle est assez amusant, pour le coup. Nous voyons défiler les accoutrements les plus divers et incongrus, cela sera finalement l'occasion de prendre de bien meilleures photos que celles des bassins.





Mélèzes et narcissisme

Ah la coupe!

En fin de journée, nous reprenons les vélos restés à l'hôtel. Il fait gris et froid. Sachant que la route est principalement en descente pour les heures à venir, on s'emballe de multiples couches de vêtements. A peine 5 km plus loin, on s'arrête faire quelques courses pour notre bivouac, et voilà qu'il se met à pleuvoir. C'est juste une averse, positive Jonas. On reste à l'abri d'un couvert un petit moment, puis un monsieur nous invite à rejoindre la chaleur de son fourneau. La nuit tombe, nous sommes assis au chaud, les yeux rivés sur le ciel qui tonne et pleut tout ce qu'il peut. Malheur, on devra encore claquer des tunes pour un hôtel que l'on ne souhaite pas vraiment. Jonas part faire le tour des 6 hôtels du village. Les tenanciers lui refusent l'accès à l'une de leur chambre. La plupart des établissements ont l'interdiction formelle d'accueillir des étrangers, ils sont redirigés vers des hôtels plus onéreux. C'est pas cool, il pleut, il fait froid, nous regrettons presque notre bon lit douillet de la veille! On nous indique tout de même un hôtel à la fin du village qui accueillerait des étrangers. Dieu sait le standing, se demande-t-on... On va encore se faire vider nos poches déjà bien trouées. Il fait nuit noire quand nous débarquons, trempés, dans le dernier établissement à la sortie du bled. Le tenancier propose un prix prohibitif. Jonas s'efforce de lui faire descendre le prix, expliquant notre situation de voyageur. Le prix est descendu d'un tiers, nous acceptons. La chambre est très simple (souris incluse), mais la douche est chaude. Ouf...

Au lendemain, nous repartons en direction de Pingwu. La balade du jour file au fond d'une superbe gorge sauvage et inhabitée. La rivière Fujiang, indomptée, serpente entre des montagnes karstiques nimbées de brume. Subjugués par la beauté quasi-mystique de cet endroit, nous roulons le nez en l'air, ébahis par la végétation luxuriante. Au loin, les plus hauts sommets ont été enneigés par la fraîcheur des dernières nuits. Les couleurs de l'automne agrémentent agréablement les forêts denses de ce paysage de carte postale. Nous nous sentons tout petit lorsque nous traversons cette magnifique gorge à vélo. Nous prenons conscience de la chance que nous avons de traverser des contrées si variées: après la steppe nue des hauts plateaux tibétophones des semaines passées et les diverses ascensions aux lacets interminables, nous voici dans un décor coloré aux ambiances de jungle.





Les rhinopithèques de Roxellane, protégés

On joue les Indiana Jones en  découvrant un petit temple en ruine perché sur un rocher surplombant la gorge, qu'on distingue à peine tant la végétation est dense et le sentier pourri. Nous pourrions peut-être tomber nez à nez avec les singes protégés dans cette réserve naturelle de Huanglong, les rhinopithèques de Roxellane. Nous ne voyons qu'une petite fouine filant de roche en roche, à la quête d'un semblable pour jouer à saute cailloux.



La route suit de près la rivière


Du cannabis pour les cordages?
A la sortie de la réserve naturelle, plusieurs villages aux maisons boisées et aux grandes baies vitrées bordent la route. Des cultures de légumes et de céréales occupent tout lopin de terre quelque peu plat. Comment allons-nous faire pour camper ici? Pas un seul spot de camping sauvage. Le terrain est soit cultivé, soit en pente. Nous hésitons à mettre la tente au bord de la rivière, mais nous craignons que l'eau monte soudainement pendant la nuit, plusieurs barrages se succédant sur toute la descente de cette rivière. Bref, on tentera notre chance chez l'habitant, peut-être.


Les cultures sèchent devant les maisons (mais et choux)

Séchoirs artisanaux en bambou

À l'entrée d'un hameau, toujours le nez en l'air, notre regard tombe sur un grand arbre ou poussent de beaux fruits oranges. Des oranges? Des mandarines? On débat. Quelques villageois viennent à notre rencontre, nous leur exprimons notre intérêt pour cet arbre inconnu à nos yeux. Un homme s'arme d'une longue tige de bambou et nous cueille plusieurs gros fruits ronds d'un orange éclatant. Nous savourons alors les kakis de la vallée de Fujiang.

Par des gestes et autres balbutiages, nous leurs expliquons notre requête pour cette fin de journée. Ils ne comprennent pas vraiment que nous cherchons à planter la tente quelque part et nous invitent chez eux! Nous sommes hébergés par une famille de trois générations vivant sous le même toit. Une étable attenant à l'habitation abrite de gros porcs grognants, des poules et un coq. La famille nous invite à sa table et le grand-père nous verse de la gniole de riz pour accompagner les plats épicés.
Après le repas, l'un d'eux se demande ce qu'il y a dans toutes ces sacoches que l'on transporte sur nos vélos. Nous parvenons à leur expliquer notre mode de vie de voyageurs en déballant quelques affaires sous leurs yeux curieux et amusés. Un réchaud pour faire à manger, des casseroles et couverts, une tente, des sacs de couchage, des outils pour les réparations, des pièces de rechange, etc.. La carte du monde est dépliée sur le sol poussiéreux de la fermette.
Qui sommes-nous? Des étrangers venus de très loin, autrement que la plupart des touristes dont ils croisent parfois le regard derrière la vitre d'un autocar rejoignant le parc plus haut dans les montagnes. Nous rangeons notre attirail. Encore un verre de thé suivi d'un bain de pied. On nous montre la chambre qui semble très confortable. Nous ne savons plus que faire de tant de gentillesse et d'hospitalité, comment pouvons-nous leur dire merci. Avant le coucher, ils nous demandent si l'on souhaite déjeuner avec eux. Nous ne pouvons refuser...
Au lendemain, il y a les restes du souper ainsi que des oeufs brouillés à la tomate. L'homme de la maison nous fait visiter sa fermette et ses beaux animaux. Avant de partir, Jonas tente de glisser un peu d'argent dans la poche de notre hôte, mais rien à faire, Madame refuse sur le champ.

Cueillette des kakis

Les petites voisines en visite - toutes la même coupe de cheveux!

Petit-déjeuner au saveurs salées

Des voisins bienheureux

Le père  de famille


Notre chambre à coucher, première à gauche

Les toilettes, derrière le mur, à gauche

Le monsieur nous présente fièrement son Tragopan de Temminck (famille des faisans cornus)
Nous reprenons la route, toujours en descente douce, pour rejoindre dans la soirée Pingwu, à quelques 60km de là. Nous apprécions les cultures de légumes entre les murs des villages. Le soleil est de la partie, le chaud aussi d'ailleurs. Nous sommes tout heureux de cette chaleur automnale. Ça fait du bien de pédaler sans veste et sans bonnet! A la pause midi, on se plaint même d'avoir trop chaud. La sieste est de mise... Emma s'endort!
 


Les piments sèchent au soleil
 
Plus que 9 kil de descente
Arrivés en ville vers 18h, nous nous baladons un peu avec nos vélos dans les rues. Marchés en plein air et rues commerçantes aux magasins diffusant leur techno à coin. Nous prenons un petit hôtel un peu miteux mais avec un bon wifi, car Jonas souhaite appeler son papa qui fête son anniversaire. Avant l'appel, pour pallier aux 7h de décalage horaire, nous sortons manger dans un bouiboui local, nous voudrions manger un émincé de poulet épicé aux cacahuettes, un met typique de la province du Sichuan. Le nom est imprononçable et nous avons oublié le guide deconversation. Nous commandons par rébus, dessins et autres mimes. Allez faire comprendre du poulet aux cacahuettes! Nous obtenons tout de même le plat choisi, un régal! A la sortie du restaurant, nous sommes attirés par de la musique diffusée en plein air, sur une grande place. Nous découvrons une foule de danseurs et danseuses pleins d'entrain. Nous essayons de suivre le rythme quelques instants. Allez, on y va, sinon on va arriver en retard pour le téléphone. C'est cool de parler à chacun des convives un instant, si loin des yeux, si proche du coeur. Merci!
 

Arrivée à Pingwu pour le coucher de soleil

On sourit devant tant de débrouillardise

marché de Pingwu
"Elle nous prend dans ses bras, calin gratuit. J'en ai la larme à l'œil, c'est beau cette authenticité, cette aide spontanée, amour et bienveillance. Merci à elle, et à notre ouverture à l'aventure, à l'inconnu, au quotidien. Chaque jour compte son lot de spécialité. C'est aussi ça, l'itinérance à vélo."
Extrait du Journal de bord de Jonas

dimanche 1 novembre 2015

18 au 26 octobre 2015 - Des kils et des cols, técol !

Notre prochaine étape est Xiahe (Labrang en tibétain), ou se trouve un monastère d'une grande importance. Nous devons rebrousser chemin sur une quinzaine de kilomètres, jusqu'au village de Bao-An, pour prendre une vallée ascendante ou nous attend un col culminant à 3'600m d'altitude. 1'200m de dénivelé au programme! La route est spectaculaire. Entourés de montagnes et de formations rocheuses ocre rouge, nous traversons des villages typiquement tibétains aux murs de pisé. Le foin est mis à sécher sur de hautes structures de lattes en bois. À notre passage, les enfants ne manquent jamais de nous héler énergiquement par des "Hello! How are you?" ou "Hello! What's your name?" dont ils n'écoutent jamais la réponse.



Des cultures dans un climat sec et aride.

Village de montagne





Les charognards tournoient autour du rocher

Le campement du soir se fait sur un champ, un peu à l'écart de la route. Nous observons au loin une dizaine de vautours volant en cercle autour d'un piton rocheux. Des bergers tibétains, affairés avec leurs troupeaux, vont et viennent à moto sur une petite piste à quelques mètres de nous. Trois d'entre eux viennent nous dire bonjour et, craignant que nous ayons trop froid, décident de nous faire un feu! Ni une ni deux, ils boutent le feu à une touffe d'épis séchés et y déposent des branches trouvées aux alentours. On échange deux trois mots: notre destination, ou se trouve leur village, combien de têtes de bétail ils possèdent. Nous sommes malheureusement toujours très limités par la langue, les Tibétains étant très peu nombreux à parler anglais.

Campement à 2800m
Monsieur ramène une pauvre chèvre égarée à son troupeau.

Que de la montée, au programme de la journée suivante! C'est la "désalpe", nous croisons nombre de troupeaux de moutons et de yaks qui redescendent des hauteurs, menés par des Tibétains en costume traditionnel. Alors que nous atteignons un plateau à plus de 3'000m, nous sommes éblouis par un magnifique panorama de chaînes de montagnes enneigées, s'étendant à perte de vue. Nous avons toutefois encore du pain sur la planche et un bon nombre de mètres de montée à faire! On ne parvient au col qu'à 18h, le soleil est déjà derrière les montagnes.

Surfing in China






Le dernier village à 3500m, avant le col.

Altitude 3643,66m

Derrière chaque col, une nouvelle surprise


On y est arrivé!

Une longue descente à la nuit tombante se solde par un bivouac dans la steppe, non loin d'un petit village. Le trafic nocturne des motos trouble un peu notre sommeil, la prochaine fois, il faudra veiller à se placer loin des habitations...



Le grassland de Ganjia

Montée du col Naren-Ka

On s'attendait à une petite bourgade tibétaine, on tombe sur de hauts et laids immeubles.
Nous atteignons Xiahe le lendemain, après avoir traversé la belle et longue steppe de Ganjia et son col Naren-Ka, à 3'400m, quittant la province du Qinghai pour celle du Gansu. Comme dans toute ville chinoise d'importance, l'agitation et le bruit règnent en maîtres. Nous nous installons pour la nuit à la jolie et chaleureuse auberge de jeunesse; nous sommes une fois de plus les seuls clients, hors-saison oblige. Nous prenons le lendemain après-midi pour déambuler dans les allées du monastère de Labrang, l'un des 6 monastères tibétains de l'ordre Gelugpa (secte des chapeaux jaunes du bouddhisme tibétain, les mêmes que dans Tintin :P). Labrang, et ses 3km de moulins à prière, compte actuellement quelques 1'800 moines, drainés dans les provinces du Qinghai, du Gansu, de la Mongolie Intérieure et du Sichuan.

Sortie des moines de la cérémonie de l'après-midi.




Nous choisissons de ne pas prendre la visite guidée en anglais, qui nous a été plus ou moins déconseillée par d'autres occidentaux. Il semble que les moines-guides se comporteraient comme des hooligans (sic) avec les étrangers. Pas trop envie de payer pour se faire villipender... D'ailleurs nous faisons rapidement l'expérience désagréable de cette impolitesse: Jonas, qui tente de photographier un groupe de petits moines, se fait directement balancer une cannette de soda à la figure par l'un d'eux... Ca va lui coûter une réincarnation, à ce petit morveux, et ça nous a quelque peu passé l'envie des monastères tibétains pour la journée... On continue notre visite sans trop d'enthousiasme, et on quitte la ville aux alentours des 17h. Prochaine étape: Langmusi.





De superbes peintures et mandalas décorent les murs intérieurs des enceintes des temples
Nous quittons la route S312 à la hauteur de Sangke et empruntons une route secondaire peu "trafiquée". Un grand problème que nous n'avons pas rencontré en Mongolie, il y a des clôtures tout le long des routes limitant les traversées intempestives du bétail. Du coup, nous ne trouvons pas facilement de coin pour bivouaquer ce soir-là. La nuit tombe, il y a des gens au loin, qui travaillent sur le chantier d'une maisonnette. Nous sortons de la route pour suivre le chemin qui nous mène à eux. Par des gestes et notre petit lexique en dessins, nous demandons si l'on peut poser la tente sur leur terrain, voir entre les 4 murs d'une des constructions. Le vent souffle, la pluie menace, il pourrait bien neiger cette nuit, le froid s'installe dans l'obscurité.

A peine posé le tapis de sol de notre tente, alors que l'orage menace d'éclater, un des travailleurs nous invite à dormir sous un toit. Nous replions et nous dirigeons sur le sentier amenant vers quelques bicoques. Une femme nous rejoint et sans condition, nous invite à rentrer toutes nos affaires dans une petite cabane de chantier. C'est bien exigü, le porte à cabine doit faire 5m sur 2,5m. Soudain, une foule de costauds gaillards arrivent et prennent place autour de la petite table basse faite de briques recouverte d'une nappe en plastique. Ils fument en buvant une bière ou du thé, croquent des graines de tournesol, discutent et racontent leur journée. Nous paraissons quelque peu étrangers autour de cette assemblée, ne sachant pas prononcer un mot de leur langage. Nous sommes invités par une équipe de travailleurs tibétophones.

Ils sont d'une générosité infinie. Ils nous offrent le souper du soir, la couche, le petit déj et le pain pour la route. Nous sommes un peu frustrés de ne même pas savoir leur dire merci dans leur langue. Nous aurions souhaité leur partager nos victuailles, mais tout ce que nous proposons est refusé. Ça nous fait un peu bizarre, car si on a la maladresse de refuser un de leur don, nous ressentons un certain malaise, comme si on leur faisait offense. Bref, nous dormons à quatre, sur une couverture chauffante posée sur le sol de cet habitat de fortune. Le lendemain le réveil est bien tôt, il ne fait pas encore jour. Il a neigé cette nuit, nos vélos sont saupoudrés de blanc. Le petit déj est servi, toute la clique des travailleurs est au rendez-vous pour ce moment convivial. Nous mangeons des nouilles de mouton, des momos aux poireaux et du bon pain, le tout accompagné de bon thé chaud. Nous sommes remplis de bonnes énergies pour attaquer le col de la journée, 300m plus haut, à 3'575m.


7h00 du matin, 3330m, il a neigé

Copieux petit déjeuner tibétain
Nos 2 hotes qui ont partagé leur matelas


Encore un col!?
Nous évoluons sur les plateaux tibétophones à des altitudes variant entre 3'000m et 3'700m. Le temps est agréable pour pédaler. A la sortie de la tente, nous portons la doudoune pour déjeuner et ranger la tente. Une fois sur le vélo, nous revêtons l'équipement standard, polaire pour la montée, veste coupe-vent pour les descentes, parfois cumulée de gants-bonnet. Par chance, nous n'avons pas de pluie depuis longtemps. La météo est plutôt sèche cet automne. Nous nous rechargeons en eau chaude dans tous les commerces ou restaurants, c'est une pratique commune. Nous pouvons nous arrêter partout, il y a toujours de l'eau bouillante à disposition. Nous en profitons pour remplir nos vaches à eau, les rivières sont pratiquement toutes polluées par les déchets et les animaux broutant en amont. Nos bivouacs ne sont plus aussi idylliques qu'en Mongolie ou au Lac Baikal. Il y a de l'activité humaine partout, même dans les campagnes reculées.



C'est le temps des récoltes et des champs pour l'hivernage
On n'a pas l'impression, mais nous sommes à quelque 100m de la route


Voici venu le temps des moissons
Cette adorable petite bestiole est un pika de Gansu (Ochotona cansus). Il s'agit d'un lagomorphe.

Nous enchaînons les cols, cette fois-ci sur une route à plus grande densité, pour arriver en fin d'après-midi à Langmusi, 3'300m d'altitude. Nous sommes à la ville frontière entre deux états, le Gansu et le Sichuan. Langmusi est aussi un haut lieu monastique tibétophone. Tous les soirs est célébré un jour de la semaine, par une cérémonie dans le temple. Les habitants et autres touristes comme nous, sont invités à partager ce moment.

Rue de Langmusi au matin

Le minaret du quartier Hui



On dirait de la neige, mais ce sont là des petits papiers de prières 





Nous profitons d'un hôtel pas trop cher et très confortable pour nous reposer 3 nuits. Le temps n'étant pas très clément, nous mettons à jour le blog. Le dimanche, on s'offre un bon décrassage des articulations en grimpant sur la montagne surplombant le village.

Les moines en congé

Plusieurs générations de tibétains

Invités à venir s'asseoir auprès de cette famille pour le pic-nic



Balade dans le massif au dessus de Langmusi

"La route est bruyante à cause de tous ces klaxons à chaque dépassement, on se sent souvent de trop, pourtant tout petit par rapport au trafic. C'est un peu saoûlant, mais le paysage est si beau. Les couleurs automnales resplendissent. Nous avons choisi la bonne saison pour visiter cette partie de la Chine. Nous sommes heureux, nous sommes en short, t-shirt, demain on remet les sandales, peut-être...rhoo voilà qu'il neige, il faut s'attendre à tout!"

"Les faciès changent, du Bouriate au Mongol, des Hui aux Han en passant par les Tibétains, les minorités de ces régions ne se ressemblent pas, restent en communauté et gardent leur moeurs, coutumes, dialectes, costumes et vêtements traditionnels. C'est tout à fait intéressant de traverser ces paysages culturels. Je ressens tout de même une certaine pression du moteur économique chinois et cette globalisation, va, un jour ou l'autre, tendre à réduire tant de différences, tant de richesses."

Extraits du Journal de Bord, Jonas




Temple de LANG MU SI







A 5 mois de voyage, 3900 km au compteur, les vélos auraient besoin d'un bon entretien. Changement de chaine, nettoyage à fond, tendre les cables de freins, etc. La roue arrière du vélo de Jonas est un peu voilée, il faudrait jouer sur les rayons. Une chambre à air est percée sans avoir été réparée. Nous devrions checker toutes les vis du vélo ainsi que celle des sacoches. Nous profiterons d'être chez un hôte warmshowers à Chengdu pour faire tout cela.