jeudi 21 juillet 2016

7 mai au 18 juin 2016 - Kirghizistan


Frontière du bout du monde
Nous entrons en territoire kirghize le 8 mai, un peu sur les rotules après cette longue montée face au vent. Nous longeons la chaîne des Tian Shan, le paysage est à couper le souffle. Des troupeaux de chevaux broutent en toute liberté dans ces immenses pâturages d'altitude, que les Kirghizes appellent «jailoo». Le vent, qui semble ne jamais tomber, nous garantit une nuit sèche sous la tente, mais soufflant toujours aussi fort le lendemain, il nous contraint à attendre la fin de l'après-midi pour lever le camp. Nous n'avons pas envie de pédaler dans la semoule pour quelques kilomètres. La route n'est plus asphaltée depuis Kegen, dernier bled kazakh avant la frontière et chaque passage de trafic motorisé soulève un gros nuage de poussière. Nous empruntons une petite route annexe qui raccourcit la distance pour Karakol. Immédiatement, une longue montée serpente sur la petite piste de pierres rondes et instables. L'expérience du VTT est bien utile pour Jonas, qui se rappelle de son ascension à la station intermédiaire du Moléson. Le sentier y ressemble, pentu et technique. Mais avec un vélo de 45 kilos, c'est moins évident ! Emma préfère ne pas se faire péter une durite et pousse sur une grande portion de montée. Nous sommes fatigués, mais la vue sur la vallée et les beaux reliefs de l'autre côté du petit col nous ravissent. Pour peu on se croirait sur la route panoramique suisse, avec ses trois géants Eiger, Monch et Jungfrau.

On retrouve les grands espaces, et des green de golf pour camper.
Les majestueuses Tian Shan en toile de fond
Ici, on vend(ait) du koumiss (boisson infâme à base de lait de jument fermenté)
et des glaces...
C'est super, on se croirait sur la route panoramique SUISSE
En redescendant dans la vallée, quelques enfants nous invitent à boire le thé dans la cuisine de leur fermette. Nous posons nos vélos et acceptons leur invitation, premier contact avec des Kirghizes. Nous sommes attablés dans la petite cuisine, seuls avec la maman et deux petites filles qui tournicotent autour d'elle. Nous buvons le thé, mangeons du pain et un samosa (beignet fourré) de mouton. Cela sera notre seul souper car dehors la pluie menace, nous sortons rapidement pour monter la tente avant l'orage. Les enfants sont tout excités, ils essaient de nous aider à monter la tente, enlèvent les sacoches de nos vélos, se fourrent à quatre dans la tente, les bottes pleines de bouse de vache... Le père de famille finit par rappeler sa marmaille à la maison. Nous sommes enfin seuls. Un gamin revient, ouvre la tente sans trop de gêne, demande des biscuits. Nous sommes surpris de l'entendre baragouiner quelques notions d'anglais. On apprend son nom, son âge. Le réveil est bien tôt, il est 6h et les gamins tournent autour de la tente. Le plus âgé (13 ans) arrive avec son cheval, il fait l'équilibriste, puis invite Jonas à monter le quadrupède. Dans la peau d'un berger kirghize, Jonas fait quelques pas à la rencontre du troupeau voisin... Il fait beau et les montagnes couvertes de neige font naître un petit élan de liberté sur le dos du canasson.

Nursultan, l'équilibriste
Plein de gamins partout!
Jojo joue les bergers d'un jour
Tout d'un coup, nous voyant préparer nos affaires pour partir, les enfants se mettent à nous harceler pour qu'on leur donne des choses. Ils nous tournent autour en réclamant des sous, nos casques, notre GPS ou nos sacoches de vélos, tout y passe, et nos biscuits ne leur suffisent pas. Ils deviennent vraiment super lourds et on ne sait plus trop comment réagir, cela ne nous semble pas une très bonne idée de favoriser ce genre de comportement en leur cédant... On fuit rapidement pour aller manger notre petit-déj un peu plus bas dans la vallée, au calme. Mais on se sent coupable, voyageurs débarquant avec nos vélos chers, notre matériel «hi-tech», nos habits techniques. Nous ne savons pas vraiment quelle est le comportement «éthique» à adopter dans une telle situation. D'ailleurs, y a-t-il vraiment une manière éthique de voyager dans des pays pauvres, en tant que «riche» occidental?

C'est à Karakol que nous parvenons enfin à changer nos derniers billets kazakhes dans un bureau de change. On peut enfin refaire des courses et manger autre chose que nos restes du Kazakhstan. Il pleut à verse durant deux jours d'affilée, que nous passons à l'abri dans la guesthouse «Neofit», qui a l'avantage d'offrir un petit-déjeuner copieux. Vu la météo, nous renonçons à la randonnée en montagne que nous avions prévue et broyons du noir. Le mal du pays se fait parfois bien sentir. Depuis notre arrivée en Asie Centrale, la météo est très capricieuse. Nous apprenons par les locaux que le mois de mai est l'un des plus pluvieux dans cette région.

Après cette halte, nous poursuivons notre route le long de la rive sud du lac Issyk Kul, deuxième plus grand lac de montagne au monde après le lac Titicaca (ça vaut un camembert au Trivial Pursuit ça coco). Nous campons une nuit au bord de l'eau, sous la tente. L'eau, légèrement salée, n'est pas très froide mais le temps n'est pas assez clément pour la baignade, dommage. C'est lors de cette charmante soirée que Jonas tente d'apprendre à voler à notre réchaud à benzine en le lançant rageusement en l'air, après une énième séance de crachotage-démontage-nettoyage-remontage-crachotage... La pompe se casse à l'atterrissage, prélude à un long feuilleton qui aura des répercussions fâcheuses bien plus tard, comme nous le verrons dans le prochain épisode. Pour le moment, cet incident nous empêche de cuisiner ou de bouillir de l'eau jusqu'à Bishkek...

La nuit tombe sur le lac Issyk Kul. En face, la chaîne des Tian Shan, frontière naturelle d'avec le Kazakhstan
La route, au revêtement défoncé, suit les bords du lac. Les différentes couleurs du ciel donnent à cet immensité lacustre des ambiances bien particulières. Tantôt océanique, tantôt turquoise comme en Algarve, tantôt d'argent orageux. On longe d'immenses camps touristiques, semblant à l'abandon depuis la chute de l'Union soviétique. Étrange...

Le temps n'est pas vraiment au beau fixe...

Encore des scènes dignes d'un film Trigon

Des ambiances "dramatiques"

Un mystérieux vieux cimetière

On aime ces paysages
 
Et des visions de bout du monde



Dans les villages on peut boire la bonne eau fraîche de la pompe


Les Tian Shan se parent de belles couleurs au couchant



Nous quittons après quelques jours ce lac d'altitude pour atteindre la plaine. Une longue descente nous attend, des kilomètres de glisse au fond d'une vallée étroite et accidentée. Au passage, on en profite pour acheter du miel de montagne et des rayons de miel qui agrémentent à merveille nos petits-déjeuners. En plaine, la température a bien pris 5 degrés, il fait doux et le soleil chauffe. Nous nous dirigeons dans une réserve naturelle où nous tentons de planter la tente. La journée a été longue. Mais le garde-forestier ne tarde pas à débarquer et nous demande d'aller camper ailleurs. Il jette sa clope dans la lagune et nous enjoint de suivre son pick-up.

Et non, on ne pourra pas rester dans ce bel endroit...

Il nous emmène vers une petite maison en ruine/construction, avec une chiotte en tôle au fond du jardin. Il s'en va alors qu'une jeune maman sort de cette masure. Elle nous offre de nous installer sous le couvert prévu pour la voiture, alors que le ciel menace (encore) de nous tomber sur la tête, et nous indique que nous pouvons boire l'eau de la cariçaie. Bof, merci, ça ira ! Nous sommes fatigués, mais nous nous préparons tout de même une grosse salade verte, carotte et concombre râpés, ail, noix, huile d'olive et citron. Madame nous apporte du thé et nous offre une assiette de sa préparation de pâtes du soir. Elle reste très discrète, nous laissant manger par terre sur le sol de son garage. On se demande quelle serait notre accueil à nous, si des étrangers à vélo débarquaient chez nous. Être présent ou distant? Partager ou ignorer? Cette femme est restée ouverte à notre présence, mais on aurait tout de même apprécié partager le repas du soir avec elle plutôt que par terre dans son garage.

Si nous sommes complètement sous le charme des paysages splendides de ce pays, il en va tout autre de ses habitants. Après ces jours passés sur la route, les Kirghizes nous semblent rustres et peu éduqués. On a la désagréable impression que les touristes et voyageurs ne sont pas les bienvenus ici, sauf quand ils sortent leurs billets. On découvre ainsi, dépités, à quel point l'obsession première des gens ici est l'argent. À chaque rencontre nous avons droit aux mêmes questions: «Combien coûte ton vélo? Combien on gagne en Suisse? Combien, combien, combien?», «Switzerland? Bank! Money! You must be rich!». Ben voyons... On en a tellement marre au bout de la deux-centième fois qu'on finit par dire qu'on est français pour avoir la paix. Il est intéressant de noter qu'en Mongolie, qui est un pays aussi pauvre, nous n'avons pour ainsi dire jamais eu ce genre de questions...

Pis, au volant, le QI du Kirghize moyen chute dramatiquement. Les voitures nous frôlent à vive allure, nous font bien comprendre qu'il faut qu'on dégage de leur route, nous klaxonnent sans arrêt, les mecs hurlent par la fenêtre juste au moment de nous dépasser pour nous faire peur (arrêt cardiaque assuré), on a même droit à quelques doigts d'honneur... La première fois en une année de voyage. Sachant que les Kirghizes peuvent acheter leur permis sans passer d'examen de conduite, on comprend mieux...

Bref, ce pays nous donne l'impression d'être en pleine déréliction, à l'image de ses kolkhozes en ruine... Les infrastructures ne sont plus entretenues, l'éducation souffre du manque d'argent depuis l'indépendance du pays, les bouteilles de vodka vides jonchent les bords de route.

Nous arrivons à Bishkek le 16 mai, après 30 km sous une pluie torrentielle. Nous sommes trempés jusqu'aux culottes et exténués de ce dernier tronçon à très fort trafic. Les automobilistes ne se privant évidemment pas de bien nous éclabousser au passage en roulant bien vite dans les grosses flaques de boue. Jonas se sent malade, nous restons dans la petite chambre de la première guesthouse qui nous tombe sous la main. Les jours suivants nous nous occupons d'obtenir notre visa tadjike, puis rejoignons l'auberge At House où nous rencontrons de nombreux autres cyclistes en vadrouille autour du monde. Nous attendons le retour du soleil pour poser dans le jardin notre tente dont le fond ne tient plus l'humidité.

De drôles de lulus chez At House
La tente dans le jardin
Nous nous sentons bien dans cette maison, au fil des jours nous avons l'impression d'appartenir à une communauté de voyageurs qui se partagent les espaces communs. La cuisine et la terrasse sont les lieux les plus fréquentés. Nous partageons nos déjeuners, préparons les repas ensemble, discutons et créons de belles amitiés, en ces quelques jours passés comme à la maison. On n'a plus envie de partir... Malgré la lourde insistance d'Emma pour racheter un nouveau réchaud (soyons francs, ça fait une année qu'il nous emmerde, ce MSR!), Jonas entreprend de le réparer en recollant la pompe. Il re-fonctionne, c'est super, ça devrait aller, on ne va pas refaire des frais... Bon, ok, on rembarque le ressuscité réchaud dans la sacoche. Vous la sentez venir, la suite, hein?

Par un beau matin ensoleillé, après un copieux petit déj' en compagnie d'Angie, la propriétaire d'At House, nous finissons par quitter cette oasis pour reprendre la route. Cap sur Osh, à quelques 400km au sud!

Nous parcourons une quinzaine de kilomètres avant de bifurquer sur une petite route de campagne pour faire une pause «chocolat». C'est sur cette petite route que nous nous faisons remarquer par un jeune Kirghize au volant, Almaz, accompagné de sa sœur et de sa maman. Après avoir fait connaissance, il nous propose de les suivre jusqu'à leur domicile. On ne sait pas que répondre, il est 16h, on pourrait encore rouler 30 km. Cependant, on n'aime pas refuser l'hospitalité des locaux, surtout lorsque la proposition est si spontanée. Allez hop, on vous suit! 

Après 2 kilomètres sur cette route de campagne, nous arrivons dans un petit domaine agricole. La famille possède trois vaches laitières, deux veaux, une jument et son jeune étalon. Jonas aide à rentrer le foin qui sèche au soleil tandis qu'Emma croque le jeune cheval sous différents angles. On flambe quelques brindilles de sapin pour allumer le fourneau où mijotera le «plov» (riz aux carottes avec des morceaux de viande) du souper. Nous nous retrouvons assis sur une estrade, sur des tapis en cercle autour du repas. Trois plats communautaires de riz accompagnés de quelques morceaux de moutons, des bols de confitures à l'abricot et au cassis, du pain tout juste sorti du four et le célèbre thé qui agrémente tous les repas. Nous partageons volontiers notre salade préparée le matin même. La nuit est tombée, la pluie tombe et des bourrasques de vent font rage. Bref, on est content d'avoir suivi nos hôtes et les kilomètres, ma foi, seront pour demain! On nous prépare une couche confortable, sur les tapis de la chambre d'amis, aux murs bleu clair. Nous sommes accueillis par une famille aux traditions musulmanes. Les femmes mariées sont coiffées d'un foulard tandis que la jeune sœur de 19 ans, porte ses cheveux au vent. L'épouse est tantôt à la vaisselle, aux fourneaux, à la préparation du repas, à la traite des vaches, aux soins du bébé, etc, tandis que l'homme discute avec ses invités, prend soin que tout aille bien pour eux. On sort les cartes du Kirghizistan, de l'Asie centrale, puis du monde. On explique notre voyage. Almaz, comme ses compatriotes, aimerait savoir comment faire pour travailler en Suisse, gagner beaucoup d'argent à l'étranger pour faire vivre sa famille. Il nous demande quel est le salaire moyen, combien coûte notre vélo...

Le doux Almaz et sa jeune épouse
Au lendemain de cette invitation spontanée, nous sommes encore invités à prendre le petit-déjeuner avant de partir. On en a bien besoin, mais rien n'est prêt et cela risque de prendre du temps! On demande à aider, mais on nous invite à nous asseoir tel qu' hier, sur les tapis qui recouvrent la terrasse couverte à l’extérieur. Il est 7h30, le soleil inonde cette belle matinée. Nous finissons par manger à nouveau avec toute la famille et les voisins. Shazada, la mère d'Almaz, nous sert une assiette de pomme de terre cuites dans l'huile. Le pain, la sauce tomate pimentée et les coupes de confitures agrémentent le thé. On se régale, mais le ciel commence à se couvrir méchamment! Il recommence à pleuvoir... Quel pays! Nous continuons notre matinée devant le petit écran de la famille. Almaz est très fier de nous montrer la vidéo de son mariage, tenu en grandes pompes l'année précédente. Une cérémonie aux traditions kirghizes, avec la limousine 15 places, la grande salle de fête pour 300 invités, les tables couvertes de multiples plats succulents servis par une vingtaine de commis. Almaz nous avoue qu'une telle cérémonie leur a coûté 12'000$. Une somme astronomique, lorsqu'on sait que le salaire moyen est de 200 $ par mois. Ça représente aussi l'équivalent d'une année de voyage pour nous deux, et du coup on relativise notre supposée richesse que nous envient les Kirghizes. De quoi évacuer notre sentiment de culpabilité mal placé.

Nous finissons par prendre congé d'Almaz et de sa famille, très touchés par leur hospitalité et heureux d'avoir vécu une belle expérience avec cette gentille famille kirghize.

Nous rejoignons la mythique route M41 qui nous fera traverser tout le pays du nord au sud, puis tout le Tadjikistan. Débute alors la longue montée du col Töö Ashuu. Au fil des virages en épingle, nous prenons de l'altitude et perdons des degrés centigrades. Il pleut au moins une fois par jour depuis notre départ de Bishkek. À l'approche du col, nous sommes pris dans une tempête de neige, il fait bien froid.


Ces babushkas sont venues faire du koumiss (lait de jument fermenté)

Le grand-père et ses petits-enfants

On entame la montée du col, en longeant la tumultueuse rivière Kara-Balta

On voit poindre au loin des sommets enneigés


Le lendemain, au petit matin. Il a plu pendant la nuit, il faut sécher toutes nos affaires.

Notre fond de tente amphibie.
On aurait visiblement mieux fait d'acheter une tente Décathlon à 200 euros…

Un tunnel étroit tronque le haut du col, à 3130 m. Nous franchissons ces 3 km bien à l'abri dans un camion. Nous nous retrouvons ainsi propulsés de l'autre côté, au-dessus de la verdoyante vallée de Susaamyr. Une belle descente sur de l'asphalte bien défoncé, puis on se lance dans la traversée de la vallée, ponctuée de jolies yourtes qui s'installent ici pour l'été. Ça ressemble beaucoup à la Mongolie.

Le col sous la neige

Dans la vallée, c'est cette fois-ci une pluie de grêle qui s'abat sur nous. On aura tout eu!

De bric et de broc


Les yourtes kirghizes

En groupe, ils squattent les bords des routes...




Les paysages changent derrière chaque col. En haut du col Ala Bel et ses 3175 m, une magnifique descente de 80 km nous attend. C'est une surenchère de torrents et de sommets enneigés, de yourtes éparpillées et de forêts de résineux. Nous dévalons la route, ne perdant pas une miette du spectacle. Les petits stands de vente de miel se succèdent au bord de la route, jusqu'en plaine. Puis la vallée finit par déboucher sur l'immense lac artificiel Toktogul. C'est le plus grand barrage du Kirghizistan, long de 65 km. La route se rapproche du lac et le longe, dans une succession harassante de montées-descentes.

On approche du col Ala Bel

Col Ala Bel, 3175 m d'altitude

De l'autre côté du col, d'autres vues tout aussi spectaculaires

À la recherche du spot de bivouac parfait

Dans la descente on en profite pour acheter du miel de montagne

La rivière Chychkan se jette dans le lac de réservoir Toktogul
Soudain, c'est la canicule!

Transport équestre

ça monte, ça descend, nul part ou planter la tente pour le repos tant mérité.
D'étranges formations rocheuses aux abords du lac Toktogul
On regarde passer l'orage sur le lac.
La berge où nous posons la tente est caillouteuse et pleine de plants de cannabis

Un campement au bord du lac, puis il nous faut encore franchir un nouveau col pour atteindre la ville de Kara Köl, créée dans les années 60 pour héberger les ouvriers du barrage de Toktogul. Alors que nous cherchons un hôtel décent à un prix correct, Alex, un Kirghize d'origine russe nous interpelle en allemand. Cet homme vit en Allemagne et passe quelques jours de vacances chez sa famille. Il souhaite nous aider, et après quelques instants, il finit par nous inviter chez son oncle. Nous nous retrouvons attablés à la cuisine, thé, café et bière à volonté, confitures maison et cerises du jardin. Nous discutons un long moment avec Alex et son oncle. C'est intéressant, nous pouvons poser nos questions sur la situation du pays et comprendre un peu mieux.
Nos hôtes d'une nuit

Depuis Kara Köl, la descente se poursuit dans les gorges spectaculaires de la Naryn, ponctuée de barrages sur toute sa longueur. Nous aboutissons alors dans la vallée de Ferghana, région divisée à l'époque soviétique entre le Kirghizistan, l'Ouzbékistan et le Tadjikistan, et où vivent une majorité d'Ouzbèkes. La température devient caniculaire, et nous pousse à faire de longues pauses l'après-midi, à l'ombre des chaikanas. La vallée de Ferghana est une région très fertile et cultivée, et les étals au bord de la route croulent sous les pastèques.
Le canyon de la rivière Naryn

À l'ombre d'une ashkana, ces mamies ouzbèkes se font un vrai festin.
Elles nous refourguent quantité de pommes et de sucreries

Bien embêtés là...

1ou 2 photos natel
Tashkomur, porte d'entrée de la vallée de Ferghana
Parfois, lorsqu'on prend le temps de se poser à l’hôtel dans quelque bourgade, il est amusant de se poser dans le parc de la ville et d'observer les scènes de la vie quotidienne. Les jeunes hommes roulent des mécaniques en discutant entre eux, tandis que les jeunes femmes toutes maquillées riguenatzent sur le banc opposé. Nous observons des familles de «classe aisée» dégustant tranquillement une glace autour d'une table ombragée. Les jeunes mamans d'une vingtaine d'années, vêtues de robes fleuries, foulard dans les cheveux, se promènent avec leur dernier bébé en poussette.

Peu avant Osh, nous croisons la route de James, exubérant cycliste britannique. On roule en sa compagnie pendant les deux jours qui nous séparent d'Osh. La circulation devient extrêmement dense et stressante, on est couvert de poussière.

Camping avec James au bord du lac de réservoir de Bazar-Korgon
À notre arrivée à Osh, Jonas prend trop vite une série de gendarmes couchés et casse sa jante arrière. Nous sommes soulagés que ça n'arrive pas dans les montagnes du Pamir. Tels des bleus, on apprend que la petite rainure se trouvant sur la jante est en réalité le témoin d'usure... Et quand cette rainure a disparu, c'est plutôt mauvais signe... Nous prenons contact avec les proprios de At House à Bishkek pour commander une nouvelle jante. James et Emma se demandent si Jonas ne devrait pas en profiter pour changer au passage aussi sa jante avant... Mais celui-ci se montre plutôt confiant. (Et là aussi, vous la sentez venir, la suite??) Il nous faudra attendre 4 jours pour que la roue arrière revienne par taxi et soit remontée sur le vélo.

Pendant ce temps, nous profitons de notre arrêt forcé pour visiter le bazaar. Nous aimons l'ambiance qui règne dans ces ruelles de containers. Les marchands attendent les clients sans les harceler, ou font parfois la sieste sur leur marchandise. Nous nous sentons libre de déambuler à travers les échoppes juste pour le plaisir.

Petite vendeuse de nan
Un tableau de couleurs chatoyantes
Jonas essaie un beau chapeau traditionnel kirghize, mix improbable
entre la casquette de Maître Gims (qui ça?) et le chapeau irlandais

Petit rafraîchissement de pieds

La vendeuse d'épices

Outils pour décorer les pains


Au petit-matin, le bazaar est encore désert

Les mandarines de la campagne



Un matin, nous allons aussi crapahuter sur la montagne sacrée Soulaiman Too qui domine la ville. La vue est très belle.
Nous sommes installés à la Osh Guesthouse, au sein d'un quartier populaire de la ville. L'immersion est assurée. Nous sommes en pleine période du Ramadan. Les fidèles ont l'interdiction de manger et boire entre 3h du matin et 21h. La vie coule au ralenti, les gens semblent fatigués et peu motivés. Ça se comprend...

Un vieux pote...
Jonas perché au-dessus de la ville, sur la montagne Soulaiman Too

Centre ville d'Osh (en rénovation)

On reprend la route le 6 juin pour la dernière étape kirghize avant le Tadjikistan. Objectif: le bled de Sary-Tash ("Scary-Trash" pour les intimes). Particularité: le col Taldyk, situé à 3615 m d'altitude. Détail amusant, la ville d'Osh plafonne à environ 1000 m. On a du pain sur la planche, quoi. Les premiers jours nous roulons en compagnie de James et son ami Adrian, mais nous sommes contraints de ralentir le rythme avant d'attaquer Taldyk, une gastro fulgurante frappant l'une des moitiés de notre couple. James et Adrian partent devant.

Bivouac à quatre

Dans la montée du col Chyiyrchyk

Et encore un col...

Ça commence tôt à rouler des mécaniques par ici

La route traverse des vallées encaissées

Les paysages sont étonnants
Pour la vue sur la chaîne des Monts Alaï, c'est râpé!
La montée que l'on vient de faire, et la vue qu'on aurait du avoir au sommet du col... Nous on n'a rien vu.
Photo: Gustavo Jeronimo
Un dernier effort avant Sary Tash
Nous voilà à Sary-Tash, dernière ville avant l'escalade du mur de montagnes qui nous fait face et qui garde bien précieusement le Tadjikistan. 5-6 guesthouses toutes aussi simples l'une que l'autre se disputent le "marché". Toilettes au fond du jardin, et pour la douche il faut attendre les bains publiques du week-end! Il n'y a pas de distributeur d'argent, la station essence n'a que du diesel et de la 80 octal, on dégote 2 magasins avec de quoi remplir nos sacoches pour les 250 km nous séparant de Murghab. Nous restons 2 nuits dans ce village à 3200 m d'altitude afin de nous acclimater. Nous devrons franchir le col Kizil Art qui fait frontière avec le Tadjikistan et se trouve à 4300 m d'altitude, il nous faudra être prêt physiologiquement. Par ailleurs, nous ne pourrons pas nous arrêter avant la frontière tadjike, séparée du poste-frontière kirghize par un no man's land de 20 km. La route menant au col est une piste de cailloux de 700 m de dénivelé, cela nous demandera toute notre force et notre volonté. Bref, on prendra notre temps pour franchir ce premier col entre le Pic Lénine (7138 m) et le Pic Kurumdy (6614m). De notre guesthouse, nous admirons cette impressionnante chaîne de montagne, remplissant tout l'horizon, tel un mur infranchissable.

Murghab est à 233 km


Notre guesthouse de la deuxième nuit à Scary-Trash

L'imposante chaîne des Pamirs 


Une dernière lessive sèche, le réchaud est nettoyé, nous avons envoyé des nouvelles à nos proches, une dernière nuit dans un bon lit douillet et en route pour l'aventure des Pamirs. Notre rêve. Des cols à plus de 4000 m, des routes se perdant dans des paysages lunaires, des pistes de tôle ondulée, l'aventure quoi!


En avant pour les Pamirs!
A nous les cols à 4000m

Une fois passé le poste-frontière côté kigrhize, les choses sérieuses commencent.
Nous voilà "enfin" sur la piste qui mène au col Kyzyl Art

3 commentaires:

  1. What a trip!!!
    It is really amazing what you have to pass through and to endure...
    I hope the so nice scenaries help you to enjoy the voyage???
    Good luck to you, best wishes and take care
    Health is fundamental
    Kiss you and hugg you hard
    The pictures are just wonderfull and so human.
    It is a pleasure to see them all with full screen

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  2. Je suis admiratif devant tous les détails de vos récits et les photos magnifiques. Je mesure bien le temps que ça doit vous prendre, même si ça repose un peu vos jambes... Alors merci et courage pour la suite.

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